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La pollution sonore et ses impacts sur la biodiversité

 

Echelle du bruit ©Université de Tours

Il y a quelques mois, nous avions étudié le phénomène de la pollution lumineuse et son impact sur les oiseaux et les zones humides. Une autre forme de pollution peut également affecter les espèces animales : la pollution sonore. Si ses effets sur la santé humaine sont plutôt bien connus, les études sur la faune sauvage restent rares : alors, penchons-nous sur le sujet !

 

Qu’est-ce que la pollution sonore ?

Le bruit d’origine humaine a augmenté dans le monde entier. Il a des impacts négatifs, notamment sur la santé (stress, maladies, sommeil dégradé…) ainsi que sur la productivité au travail. Une étude de l’Ademe (Agence de la Transition écologique) d’octobre 2021 estime ainsi à plus de 147 milliards d’euros par an le coût social du bruit en France.

On parle de pollution sonore lorsque les nuisances sonores provoquées par les activités humaines, comme les transports ou les activités de chantier, perturbent l’acuité auditive – la perception des sons – la santé et les écosystèmes.

© Friedberg

Dans les villes, la plupart des bruits sont de basse fréquence et produisent des sons graves, comme le ronronnement d’un moteur de voiture. L’amplitude du bruit, c’est-à-dire son volume, augmente avec la circulation automobile. Cela pose un problème aux animaux vivant en ville qui utilisent les sons pour communiquer.

Lorsque deux personnes discutent au bord d’une rue bruyante, elles sont obligées de crier pour dépasser le vacarme ambiant et se faire entendre. Il en va de même pour les animaux. Ainsi, les oiseaux utilisent les sons pour attirer les partenaires, repousser les rivaux, avertir les autres de la présence de prédateurs et, plus généralement, partager des informations avec leurs congénères.

© Frontiers for young minds

La pollution sonore modifie les comportements des oiseaux

Le chant est un comportement dont certains oiseaux peuvent modifier la volume ou la fréquence à volonté, en fonction du niveau de bruit présent. La pollution sonore ayant augmenté au fil du temps, cette flexibilité vocale a permis à certains oiseaux de s’adapter aux paysages sonores urbains et d’éviter d’être exclus des villes bruyantes. Ainsi, afin d’être entendus en ville, ils chantent plus fort et de manière plus aigüe pour dépasser le bruit ambiant. Ils choisissent également des moments de la journée où le bruit est réduit : par exemple, avant ou après l’heure de pointe.

© hedera.baltica sur flickr. Le merle chante plus fort en ville qu’à la campagne

Lors des confinements durant la crise sanitaire COVID19, les villes sont devenues silencieuses. Les oiseaux se sont adaptés et ont chanté de manière moins forte et plus grave[1]. Toutefois, chez certaines espèces, les populations originaires des villes chantent plus fort que leurs congénères ruraux, y compris en l’absence de pollution sonore. Ces populations semblent avoir intégré de façon permanente la modification du volume de leur chant ainsi que le moment de la journée pour communiquer[2].

 

La pollution sonore perturbe la recherche de nourriture

La pollution sonore affecte les animaux dans leur communication… mais également dans leur capacité à se nourrir ! Les rapaces nocturnes – tels que les chouettes et les hiboux – ainsi que les chauves-souris utilisent les sons émis par leurs proies pour les localiser lorsqu’ils chassent. Mais cette capacité est affaiblie par le bruit de la circulation qui masque les sons émis par les petits rongeurs et les insectes. Ce dérangement peut s’étendre à plus de 120 mètres d’une route[3] !

Chouette effraie ©Pixabay

La pollution sonore peut également perturber les espèces dans leur capacité même à se reproduire. Des chercheurs ont ainsi constaté des taux d’éclosion réduits chez trois espèces d’oiseaux nichant à proximité d’un site de production de pétrole et de gaz. En cause : un niveau anormalement élevé de stress chez les femelles. Le bruit des machines couvrant les sons produits par les prédateurs, les oiseaux devaient faire preuve d’une vigilance accrue.

Une enquête menée par des scientifiques du Centre d’études biologiques de Chizé au sujet des nuisances urbaines subies par différentes espèces d’oiseaux et des solutions à apporter. Reportage publié par le CNRS et LeMonde.fr.

 

La santé de la faune affectée par la pollution sonore

Selon certaines conclusions de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le bruit est le deuxième facteur environnemental le plus important à l’origine de problèmes de santé chez l’homme, juste après l’impact de la pollution atmosphérique. Mais qu’en est-il de la santé de la faune sauvage ?

Les espèces animales, dont celles des milieux humides, ne sont pas épargnées. Ainsi, chez la Rainette verte, une exposition au bruit augmente le niveau d’hormone de stress. Cela induit d’une part un effet immunosuppresseur, c’est-à-dire que le bruit empêche le système immunitaire de se défendre normalement contre les microbes. D’autre part, cela a un impact négatif sur la coloration du sac vocal de cette grenouille. Or la coloration vive est un signal de bonne santé : les mâles moins colorés sont donc peu attractifs pour les femelles et se reproduisent moins !

Rainette verte mâle et son sac vocal ©Wikipedia

👉 Pollution sonore et biodiversité : les points clefs


  • L’augmentation du bruit anthropogénique – causé par l’être humain – dans le monde entier affecte le système immunitaire des espèces animales et leur capacité de reproduction.
  • La pollution sonore pourrait affecter un plus grand nombre d’espèces animales qu’on ne le pensait auparavant.
  • La pollution sonore est responsable d’une plus faible biodiversité des zones urbaines : sensibles au bruit, certaines espèces quittent les villes.
  • Pour réduire la pollution sonore et préserver la biodiversité des zones urbaines, des solutions existent ![5][6] Par exemple : l’établissement de zones de quiétude pour la faune sauvage urbaine et périurbaine, tels que des parcs ; la végétalisation des façades des bâtiments, pour limiter la réverbération des sons et servir de support à la faune sauvage ; la sensibilisation du plus grand nombre à la diversité sonore qui nous entoure, pour promouvoir des paysages sonores au service du bien-être des espèces animales… dont l’humain fait partie ! ?

 

Références

[1] Derryberry et al., 2020. Singing in a silent spring: Birds respond to a half-century soundscape reversion during the COVID-19 shutdown. Science, 370 (6516) : 575–579. https://doi.org/10.1126/science.abd5777

[2] Reichard et al., 2020. Urban birdsongs: higher minimum song frequency of an urban colonist persists in a common garden experiment. Animal Behaviour, 170: 33-41

[3] Senzaki et al., 2016. Traffic noise reduces foraging efficiency in wild owls. Scientific Reports 6: 30602; doi: 10.1038/srep30602.

[4] Meillère et al. 2015. Influence of Urbanization on Body Size, Condition, and Physiology in an Urban Exploiter: A Multi-Component Approach. PLoS ONE 10(8): e0135685. doi:10.1371/journal.pone.0135685

[5] https://www.cerema.fr/fr/actualites/sons-biodiversite-ville-favoriser-paysages-sonores-qualite

[6] EEA, 2014. Good practice guide on quiet areas. Technical report No 4/2014. 53 pages. http://www.eea.europa.eu/publications/good-practice-guide-on-quiet-areas

  • Jones G. (2008).— Sensory Ecology: Noise Annoys Foraging Bats. Current Biology. Volume 18. Numéro 23. Pages R1098–R1100. http://dx.doi.org/10.1016/j.cub.2008.10.005
  • Nemeth, E. et al. (2013) Bird song and anthropogenic noise: vocal constraints may explain why birds sing higher-frequency songs in cities. Proc R Soc B 280: 20122798.

  • Troïanowski M. et al. (2017). Effects of traffic noise on tree frog stress levels, immunity and color signaling. Conservation biology. http://doi.org/10.1111/cobi.12893

 

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